Dans la nuit de vendredi à samedi, la saison 2024 démarrera officieusement pour l’Équipe cycliste Groupama-FDJ à l’occasion de la Down Under Classic, critérium préliminaire au Tour Down Under. Dans les rues d’Adélaïde, Laurence Pithie aura l’occasion de se tester une première fois, à l’orée de sa deuxième saison dans le WorldTour qu’il espère aussi réussie que la première. Auréolé de nouvelles responsabilités, le Néo-Zélandais de 21 ans s’est livré en longueur en marge de sa reprise.

Laurence, comment vas-tu et comment se sont passés ces trois derniers mois ?

Ça va très bien. Je suis revenu en Nouvelle-Zélande il y a trois mois et j’ai passé la plupart de mon temps à Christchurch. J’ai voyagé dans le Sud pour voir certains de mes amis courir, puis je suis rentré à la maison et j’ai passé beaucoup de temps avec des amis, j’ai rattrapé le temps perdu. Après huit mois passés en Europe, ça fait du bien de revoir des visages familiers. J’ai aussi fait un peu de course à pied durant l’intersaison, et c’était sympa de faire quelque chose de différent. J’ai notamment participé à une course de 26 kilomètres autour des montagnes. C’était vraiment chouette, une belle expérience. J’ai d’ailleurs gagné cette course au final, mais ce n’était pas un événement très officiel.

« Une transition vraiment fluide de la Conti au WorldTour »

As-tu également eu le temps de repenser à la saison 2023 ?

Bien sûr. Tout le monde ici me demandait également comment s’était passée la saison et me félicitait pour ma première année en WorldTour. Je pense que c’est une saison dont je peux être satisfait. C’était ma première année dans le WorldTour et j’ai réussi à accrocher une victoire. C’était vraiment super, et j’ai pu obtenir d’autres résultats sympas comme une cinquième place sur la Hamburg Classic. Je n’ai subi qu’une seule chute sérieuse, qui m’a éloigné de la compétition pendant un mois. A part ça, ça a plutôt été une année sans problème pour moi. Une année réussie, avec également des opportunités.

As-tu eu la sensation de bien supporter le passage au niveau supérieur ?

Les courses étaient clairement d’un autre niveau. J’ai vraiment pu m’apercevoir de la force des concurrents, notamment lors du Tour Down Under l’année dernière. Étant donné que je n’avais pas eu la meilleure préparation après avoir été heurté par une voiture et attrapé le Covid, je suis arrivé là-bas insuffisamment préparé. Je me suis dit : « wow, je ne suis pas sûr de pouvoir les suivre ». À partir de là, je savais que je devais augmenter mon niveau si je voulais rivaliser avec les meilleurs. Et à partir de là, ça n’a d’ailleurs fait que de s’améliorer, notamment sur l’UAE Tour, où mon niveau était bien meilleur. Ceci étant, je pouvais encore mesurer la vitesse du peloton, car le niveau était super élevé, surtout dans les sprints. À mon arrivée en Europe, sur la Nokere Koerse, j’ai obtenu un bon résultat en terminant dans le top 10. Ça a été une excellente semaine pour moi, car même si j’ai chuté à Denain, ce n’était rien de bien gênant. Sont donc arrivées mes premières courses Coupe de France FDJ avec la Classic Loire-Atlantique puis Cholet-Pays de Loire, où j’ai pu terminer deuxième et premier. C’était vraiment cool d’obtenir ces résultats aussi tôt. Au final, l’équipe a permis une transition vraiment fluide de la Conti au WorldTour. Ils m’ont vraiment bien accompagné et m’ont donné un beau programme où j’ai pu apprendre et connaître les courses les plus difficiles, mais aussi faire des courses où je pouvais réaliser de beaux résultats comme en Coupe de France FDJ.

Imaginais-tu gagner une course dès ta première saison au plus haut niveau ?

J’y pensais forcément. La victoire est toujours dans un coin de la tête, surtout pour une première saison, histoire de se décharger d’un poids. Il n’y avait pas de pression ceci dit, mais j’espérais malgré tout gagner. C’était incroyable de pouvoir y arriver. Je ne dirais pas que la victoire était un bonus, mais je pense qu’après avoir gagné, le reste de la saison était un bonus.

« De grands objectifs et une grande motivation »

Tu as également évoqué cette cinquième place à Hambourg. T’attendais-tu à jouer les premiers rôles sur une Classique WorldTour ?

Certainement pas. C’était plutôt une surprise. Je n’étais pas le leader ce jour-là. On jouait sur Jake, mais il ne se sentait pas super, alors j’ai saisi mon opportunité. Je me suis bien placé dans le final, et j’avais encore un peu de vitesse dans les jambes. C’était assez confus, puisque Mads Pedersen est sorti sur la fin et a rattrapé l’échappée sur la ligne. Je pense qu’avec un peu plus d’expérience, j’aurais vraiment pu monter sur le podium de cette course. C’est quand même un très beau résultat à prendre, surtout compte tenu de l’adversité. C’était la première fois que je me battais avec de grands sprinteurs. C’était vraiment intéressant de passer de lanceur pour Arnaud à sprinter contre lui. C’est un résultat qui doit servir de fondations pour la suite.

Tu es sur le point de commencer ta deuxième saison en WorldTour. Comment l’abordes-tu ?

Je suis extrêmement motivé pour bien démarrer la saison, en bonne forme et avec de beaux résultats. L’équipe m’a montré beaucoup de confiance, notamment sur ce Tour Down Under, puisque je serai leader dans les sprints. Je me sens préparé et prêt à démarrer fort, puis à continuer sur ma lancée lors du retour en Europe. J’ai de grands objectifs et une grande motivation. Je veux être dans le coup dès le début.

« Découvrir les Classiques et un Grand Tour »

Qu’as-tu vu en 2023 que tu souhaiterais améliorer dès cette année ?

Mon grand objectif durant l’intersaison était de travailler sur ma puissance maximale pour le sprint. J’ai vu en 2023 que j’étais capable de bien me positionner et que j’avais la vitesse, mais je dois vraiment travailler ma vitesse de pointe pour les arrivées. Je suis retourné à la salle de sport, ce qui m’a fait beaucoup de bien. J’y allais beaucoup lorsque je faisais de la piste, mais depuis que j’ai rejoint l’équipe Conti, je n’en faisais plus. Je travaille maintenant pour améliorer ma puissance maximale et j’espère que cela me mènera vers de bons résultats.

Sachant que tu as déjà gagné l’année dernière, quel est ton objectif en 2024 ?

Gagner à nouveau mais à un niveau supérieur. Au lieu d’une course .1, j’aimerais gagner une course Pro Series ou même dans le WorldTour. C’est un grand objectif mais je pense que ça doit être mon objectif. Il y a encore du travail à faire mais je pense que c’est tout à fait possible cette année. J’ai envie de découvrir d’autres courses également. Je devrais faire les Classiques cette année, celles pavées du printemps, comme le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Je n’ai pas fait beaucoup de Classiques WorldTour l’année dernière, donc ce serait un grand objectif cette année d’apprendre auprès de quelqu’un comme Stefan et de progresser dans ces courses pour l’avenir. Le plan pour moi est de débuter sur Kuurne. Suite à cela, je ferai Paris-Nice pour faire profiter de mes capacités sur le contre-la-montre par équipes, puis je passerai aux grandes Classiques, avec pour objectif principal d’aider Stefan ou Valentin à gagner et d’être là pour les soutenir dans le final des courses. Aussi, je pourrais découvrir un Grand Tour. Au départ, le plan était de faire la Vuelta, mais désormais, je pense que je vais plutôt faire le Giro. Il y aura de belles opportunités d’obtenir de bons résultats et d’engranger la force d’un premier Grand Tour.

« J’aimerais être un sprinteur polyvalent »

Ton profil en tant que coureur est-il désormais clair pour toi ?

Je pense qu’il y a encore beaucoup d’inconnues, mais je m’oriente plutôt vers le sprint et les Classiques. On voit maintenant que les gars qui sprintent sont aussi très forts dans les Classiques. J’aimerais être un sprinter polyvalent qui puisse être là dans un sprint massif, mais aussi à l’avant sur une Classique difficile. L’époque où l’on était un pur sprinter est révolue, c’est clair. Il n’y pas souvent des journées toutes plates. Il faut pouvoir être polyvalent et c’est ce que j’essaie de faire. Maintenant, je veux également avoir un bon sprint final, car à moins d’arriver solo, c’est comme ça qu’on gagne des courses désormais. Je ne suis clairement pas un coureur à la Groenewegen, mais plutôt à la Philipsen ou de De Lie, des gars qui peuvent concourir sur n’importe quel type d’arrivée : arrivée en léger faux-plat montant, ou quand il faut passer une montée proche de l’arrivée. C’est ce que j’aimerais pouvoir faire.

L’équipe attend-elle aussi plus de toi cette année dans les sprints ?

C’est certain, l’équipe compte sur moi désormais. Maintenant qu’Arnaud n’est plus dans l’équipe, il est temps pour Paul et moi de monter en gamme. Il y a aussi Matt Walls qui est arrivé, et qui a un très bon sprint. Il est donc temps de passer au niveau supérieur, et l’équipe compte sur moi pour progresser, passer un cap dans mon sprint et pouvoir jouer la victoire. De ce point de vue, mon rôle va progresser dans la mesure où je resterai davantage en retrait dans peloton et laisserai les autres suivre les mouvements. Je pense que tout dépendra aussi de la situation de course et des coureurs que nous avons dans l’équipe, mais j’aimerais quand même demeurer un coureur offensif.

Après quelques années au sein de la structure, as-tu complètement trouvé tes marques ici ?

Oui bien sûr. Il y a une super ambiance dans l’équipe et ça a été génial de rejoindre le WorldTour avec six de mes coéquipiers, qui sont aussi mes amis, et de franchir cette nouvelle étape ensemble. Bien sûr, quand je suis arrivé en Europe, ça a été un gros choc, car je ne parlais ni ne comprenais le français. Aujourd’hui, je pense m’être bien intégré au sein de l’équipe, je me sens très bien accueilli par tout le staff et les coureurs. Je suis vraiment heureux ici.

« Quand je cours, je pense aux gens qui me regardent à la maison »

Ressens-tu aussi un certain enthousiasme pour cette nouvelle génération ?

Avec la retraite de Thibaut et le départ d’Arnaud, c’est le moment pour les jeunes de monter au créneau. Le public et les fans étaient vraiment enthousiastes par rapport à ça, c’est vrai. Tout le monde avait de grandes attentes et je pense que nous avons été à la hauteur de ces attentes l’année dernière avec Romain qui a remporté de nombreuses victoires et Lenny qui a porté le maillot rouge par exemple. Être dans cette équipe, et être entouré d’autant de talents, c’est vraiment cool. Nous sommes là pour être performants et veiller à maintenir l’équipe au haut niveau, surtout avec les gars un peu plus âgés qui performent déjà très fort. Quand Lenny et Romain gagnent, tout le monde veut gagner, et tout le monde est motivé. Cela tire toute l’équipe vers le haut.

Ressens-tu aussi personnellement une certaine attention de la part du public français ?

Bien sûr, je vois des trucs sur Twitter. On peut voir et sentir qu’il y a des attentes. Je vais essayer de les honorer du mieux que je peux. Quand je vois ce genre de choses, ça me motive encore davantage à évoluer à un haut niveau et à obtenir de bons résultats.

As-tu l’impression d’avoir gagné des fans ici ces dernières années ?

C’est difficile à savoir, mais je l’espère ! Les supporters français sont très passionnés (sourires), et c’est cool d’avoir des gens derrière moi, qui me soutiennent et qui suivent mes courses. Tout ce que je peux faire, c’est essayer de performer pour les rendre fiers. Il y a aussi évidemment beaucoup de monde qui nous suit depuis la Nouvelle-Zélande, en particulier Reuben et moi. Ce n’est pas simple de garder un œil sur le sport quand on est à l’autre bout du monde, mais tout le monde nous soutient vraiment. Je sais que beaucoup de gens se réveillent pour me regarder courir, et quand je cours, je pense aux gens qui me regardent à la maison. C’est toujours une bonne motivation.

« La campagne australienne et les championnats nationaux sont de vrais objectifs »

Ne pas être au centre de l’attention, ça te convient ?

Je pense que l’année dernière, il n’y avait pas beaucoup de pression ni d’attentes. L’objectif était plutôt d’apprendre et de prendre les courses au fur et à mesure qu’elles venaient. Mais cette année, il y aura plus de pression. Et selon moi, la pression est une bonne chose, car si personne ne vous met la pression ou n’a d’attentes, c’est qu’on ne croit pas beaucoup en vous. Alors je prends la pression comme elle vient, je place la barre des attentes assez haut et j’essaie d’y répondre.

As-tu bien préparé cette campagne australienne ?

C’est clairement un objectif. Je suis arrivé ici avec une bonne forme, je me suis bien entraîné chez moi en Nouvelle-Zélande, donc je ferai tout ce que je peux pour obtenir les meilleurs résultats ici. J’ai de grands espoirs de bien performer ici. Je ne suis pas là seulement pour m’entraîner, je suis là pour prendre la course comme elle vient, monter sur un podium, voire sur la plus haute marche. Je vais saisir toutes les opportunités dans les arrivées groupées. Je vais essayer d’être présent et de jouer ma carte. Ce n’est pas une très longue campagne, on va donc essayer de tirer le meilleur parti de notre temps ici et de faire de chaque étape une opportunité.

As-tu aussi des attentes pour tes championnats nationaux ?

C’est aussi un grand objectif. Ce sera une belle occasion, le parcours me convient bien, je vais essayer de gagner et de ramener le maillot en Europe. Ce sera aussi l’occasion d’attirer l’attention… J’aimerais beaucoup aller aux Jeux Olympiques cette année, donc gagner le championnat serait un joli argument pour décrocher une éventuelle sélection.

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