Pour la toute première fois de sa jeune carrière, Kevin Geniets sera ce vendredi au départ du Tour de France, à Copenhague. Premier coureur à avoir rejoint la WorldTeam depuis la Conti, en 2019, il sera donc aussi le premier ancien membre de la Conti à participer au Tour. L’ancien champion du Luxembourg ne pourra certes exhiber ses couleurs nationales en ce mois de juillet, mais il va bel et bien réaliser un rêve de gamin. Surtout, il se sait attendu en tant qu’équipier modèle tout au long des trois semaines. Il nous a livré ses sentiments à l’avant-veille du Grand Départ.

Kevin, qu’est-ce que cela fait de se dire qu’on va prendre le départ de son premier Tour dans quelques heures ?

C’est vraiment spécial. C’est la course que je regarde à la télé depuis que je suis petit, c’est la course dont tout le monde parle. Alors être finalement au départ moi-même, c’est un moment très particulier. D’un côté, je me dis que c’est la suite logique de ma progression. D’un autre, j’ai conscience que c’est un vrai privilège d’être ici. Certains coureurs WorldTour n’obtiennent jamais cette occasion. J’ai fait les Jeux Olympiques l’an passé et je fais le Tour de France cette année. Ce sont les deux évènements auxquels j’ai toujours rêvé de participer. Quand tu finis ta carrière, les gens te demandent généralement ce que tu as fait. Je pourrai dire les Jeux et le Tour, ça a quand même de la gueule. J’ai vraiment la sensation de cocher une case importante de ma carrière cycliste. La première question des gens qui ne s’intéressent pas plus que ça au vélo est toujours : tu as fait le Tour ? Si tout se passe bien, je pourrai bientôt dire oui, avec fierté.

« Une fierté d’avoir obtenu ma place »

Ressens-tu un peu de nervosité à l’aube de cette nouvelle aventure ?

D’une part, je suis excité, d’autre part, je sais un peu ce qui m’attend ayant déjà fait un Grand Tour l’année dernière. Je pense que beaucoup de gens pensent que c’est un pur plaisir pendant trois semaines, mais quand tu es coureur cycliste, tu sais exactement ce que c’est. Il y a des hauts, mais aussi des bas et des moments extrêmement durs sur la fin quand tu es vraiment cramé. Tu passes de sales moments sur un Grand Tour. Je veux profiter de cette expérience, mais je reste lucide et je sais ce qui se profile. Avant de disputer la Vuelta l’an passé, je ne savais pas comment mon corps allait réagir sur trois semaines. Quand tu n’as jamais fait un Grand Tour, ça te semble même un peu irréaliste car tu finis cramé des courses comme le Dauphiné. Tu en viens à te demander comment font-ils pour continuer deux semaines. Finalement, le corps arrive à un certain état de fatigue mais ça ne se dégrade pas tant que ça. Tu restes à un niveau très correct bien que fatigué. Il est clair, en tout cas, que je suis beaucoup plus serein au départ de ce Tour que je ne l’étais l’an passé sur la Vuelta.

Était-ce un réel objectif d’être sur le Tour cette année pour toi ?

C’était un peu le projet depuis cet hiver, oui. On avait parlé du rôle que j’avais dans l’équipe, et de l’importance qu’il pouvait revêtir sur les plus grandes courses. C’était un souhait de ma part, mais aussi un souhait de l’équipe. L’équipe connait mes points forts et sait ce que je peux apporter au collectif. Mon but personnel était aussi de franchir la prochaine étape, et donc d’aller sur le Tour. On a bossé ensemble pour ce projet. C’était la grosse trame de la saison, mais il fallait que tout se déroule bien. Le début de saison a été correct, le Dauphiné a été bon, et petit à petit, je me suis fait ma place dans la sélection. Après le Dauphiné, j’étais plutôt confiant. C’est un peu le plan de carrière que j’avais espéré, mais dans le sport, ça ne se passe pas toujours comme on le veut. Jusque-là, pour moi, tout s’est vraiment bien passé et j’ai continué à progresser tous les ans. Je ne l’aurais pas forcément cru si on m’avait dit que mon deuxième Grand Tour serait le Tour, mais je me sens prêt.

Il a fallu faire tes preuves plus que d’habitude ?

Je pense que oui, mais je n’ai pas voulu me focaliser là-dessus non plus. Mon but était de faire le meilleur travail possible comme je l’ai fait sur le Dauphiné ou lors des Classiques. Je ne pensais pas forcément au Tour, je ne me mettais pas une pression particulière pour essayer de gagner sélection. J’ai plutôt essayé de montrer le meilleur de moi-même, et la sélection est arrivée naturellement. C’est déjà très satisfaisant d’être en WorldTour, mais faire partie des huit mecs sur trente retenus pour faire le Tour, c’est encore plus spécial. C’est une petite fierté d’avoir obtenu ma place.

« J’ai vu que j’avais encore passé un petit cap sur le Dauphiné »

As-tu travaillé différemment ?

Depuis l’année dernière, je coupe mes saisons en deux parties bien distinctes. Dans la première partie, il y a les Classiques où je suis un peu plus lourd et pour lesquelles je travaille davantage mes qualités de puncheur et de lactique. Après les Classiques, je bascule plus vers la montagne et les efforts longs, au seuil, au tempo. L’année dernière, ça avait déjà bien fonctionné et je n’étais d’ailleurs pas si mal dans les montagnes du Dauphiné. Cette année, j’ai vu que j’avais encore passé un petit cap sur ce même Dauphiné.

Tu as engrangé de la confiance sur le Critérium du Dauphiné ?

Clairement. Quand David gagne son étape, c’est la première fois que j’arrive à faire cinquième d’une arrivée si dure, à la pédale, sans échappée. Ça m’a aussi un peu ouvert les yeux sur mes qualités sur ce genre d’arrivée. Le matin, je n’aurais pas forcément cru pouvoir finir cinquième, quasiment dans la roue de Van Aert. Je suis aussi content de ce que j’ai montré en montagne. En fait, tout s’est bien enchaîné jusqu’à maintenant. Après le Dauphiné, je suis reparti en altitude à Tignes, avec Valentin et David au début. J’ai ensuite rallongé seul quelques journées, et ça s’est vraiment bien passé. Sur le championnat du Luxembourg, j’avais de bonnes jambes mais c’était compliqué à gérer tactiquement. Je suis confiant quant à ma condition. C’était plus compliqué pour mon premier Grand Tour l’an passé, car je revenais des Jeux et je sentais que je n’étais pas arrivé au top de ma forme au départ. Cette fois-ci, je sens que tout s’est bien déroulé, je ne me sens pas fatigué. J’ai bien géré pour le moment, mais ce n’est que le début.

Quel sera ton rôle sur ce Tour de France ?

Je connais exactement mon rôle, on a eu des réunions avec les directeurs sportifs à ce sujet. Ce sera de rester le plus longtemps possible autour de David, de le protéger, d’être là pour lui. Et ce sera ça sur l’ensemble du Tour, et sur un peu tous les terrains. Lors des premières étapes, et notamment sur les pavés, je pourrai apporter mon expérience des Classiques. Ensuite, il faudra jusqu’à quel point je pourrai aider en montagne, mais au Dauphiné, j’ai montré que j’étais capable d’apporter.

« Je sens que David a confiance en moi »

Quelle relation entretiens-tu avec David ?

Ça se passe vraiment bien. On a fait de plus en plus de courses ensemble depuis l’an passé, notamment en vue de ce qui se profile maintenant. On était aussi ensemble en stage à Tignes, au Teide, et on commence donc à très très bien se connaître. En course, je sens qu’il a confiance en moi, qu’il reste dans ma roue, et c’est quelque chose d’important. Ça facilite beaucoup mon travail.

Es-tu triste de ne pas pouvoir exhiber tes couleurs luxembourgeoises sur ce Tour ?

Un peu, car je pense m’être un peu habitué au maillot ces deux dernières années. C’était vraiment spécial et je ressentais un peu de fierté maintenant que je vis en France. J’avais toujours un petit bout de Luxembourg avec moi. Ça a été dur de l’abandonner, mais il y a plus important que ça.

Que te souhaiter pour ce Tour ?

J’espère simplement que le travail effectué en amont paiera, que je serai en capacité de montrer ce que je sais faire, et qu’on pourra se revoir dans trois semaines à Paris.

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