Arnaud Démare est définitivement lancé. Une grosse semaine après sa première victoire de la saison, le sprinteur picard a remis le couvert ce dimanche, à l’occasion de la Brussels Cycling Classic. Opportuniste et offensif, il est dans un premier temps parvenu à intégrer un groupe de costauds, établi à travers les deux passages sur le Mur de Grammont. Il a également pu compter sur le soutien de Lewis Askey à l’avant, et notamment dans le dernier kilomètre, pour lui permettre de disputer la victoire au sprint. Au terme d’un emballage en comité réduit, il s’est alors octroyé sa 93ème victoire en carrière.  

Pour la neuvième fois depuis son passage chez les pros, Arnaud Démare se présentait ce dimanche au départ de la Brussels Cycling Classic, auparavant connue sous le nom de Paris-Bruxelles. Une épreuve qu’il avait déjà dominée en 2017, sur un tracé néanmoins plus abordable que dans cette édition 2023, qui empruntait notamment le célèbre Mur de Grammont à deux reprises dans la deuxième moitié de course. Le Bosberg et le Congoberg venaient aussi garnir l’itinéraire, en plus de deux secteurs pavés dans le final. Le tout présageait donc d’une course mouvementée, mais c’est d’abord un schéma typique qui s’est mis en place, avec la formation d’une échappée de quatre hommes autour de Ludovic Robeet (Bingoal WB), Paul Lapeira (AG2R Citroën), Jens Reynders (Israel-Premier Tech) et Jonas Abrahamsen (Uno-X). Ce n’est toutefois qu’avec un avantage de trois minutes que le quatuor a atteint la mi-parcours, et s’est bientôt présenté dans les premiers monts flamands. « On pensait que ça bougerait très tôt, dans le Mur de Grammont et le Bosberg, indiquait Yvon Madiot. J’avais demandé aux gars d’être vigilants au premier passage, d’être dans les vingt premiers car on voyait bien un groupe se détacher. C’est ce qu’il s’est passé ». « Mon boulot était d’être devant et de suivre les attaques dans les premiers monts, complétait Lewis Askey. C’est ce que j’ai fait. Dans un premier temps, je me suis retrouvé à l’avant dans un groupe de quatre, puis une vingtaine de mecs nous ont rejoints, dont Arnaud ». « Laurence aurait dû être là mais deux coureurs sont tombés devant lui et il n’a pas pu passer », précisait encore Yvon.

« On a toujours été bien collectivement », Yvon Madiot

À plus de 80 kilomètres de l’arrivée, la course était donc déjà lancée et un premier peloton prenait petit à petit ses distances sur un second, plus étoffé. Une trentaine de kilomètres plus loin, les coureurs ont de nouveau franchi l’enchaînement Mur de Grammont-Bosberg-Congoberg. L’échappée a été avalée par le premier groupe, et la lutte à distance s’est poursuivie. « C’était compliqué car il n’y avait d’abord pas beaucoup de collaboration, et j’ai dû beaucoup rouler avec Intermarché-Circus-Wanty pour maintenir l’écart, car ce scénario nous convenait, indiquait Lewis. Lors du deuxième passage dans les monts, j’ai vraiment dû m’accrocher ». « Arnaud a aussi demandé à Lewis de lever un peu le pied car il travaillait trop, et on a laissé faire un peu après le deuxième passage, expliquait Yvon. Le fait que l’échappée ne prenne pas trop d’avance nous arrangeait car je craignais que ça attaque dans tous les sens si l’écart devenait trop important. Il y a toujours eu entre 20 et 40-50 secondes, et donc ça continuait de rouler devant. J’avais aussi demandé à ceux derrière de rester vigilants, et on avait encore une grosse garde au cas où ça rentrait. On a toujours été bien collectivement. On était plutôt serein pendant la course. Les gars n’ont jamais baissé la garde, ils ont couvert l’offensive d’Arnaud et Lewis. Malheureusement, il y a ensuite eu une chute à vingt kilomètres de l’arrivée qui a impliqué Paul, Enzo et Miles ».

Si les deux derniers cités n’ont pas subi d’importants dommages, Paul Penhoët a en revanche été transporté à l’hôpital pour y passer des examens. Pendant ce temps, le deuxième peloton s’est montré de plus en plus menaçant, ramenant l’écart à tout juste dix secondes à vingt bornes du terme. « Je pensais que ça allait revenir, confiait même Arnaud. J’étais déçu car on avait fait beaucoup d’efforts devant. Je me suis dit « tout ça pour rien », mais finalement, ils devaient être à bloc derrière également car on a repris du terrain ». Dans les quinze derniers kilomètres, la victoire s’est ainsi dessinée plus nettement pour le groupe de tête, qui a gardé une certaine harmonie jusque dans les cinq dernières bornes. Alors, quelques offensives ont fait irruption mais certains coéquipiers se sont sacrifiés pour leur leader. C’est aussi ce qu’a réalisé Lewis Askey peu avant la flamme rouge. « Dans le final, je voulais lancer Arnaud mais un coureur de Jayco-AlUla a attaqué, relatait le Britannique. J’ai vu que les mecs en tête de groupe étaient épuisés, et je savais que si je laissais faire, il était possible qu’il aille au bout. J’ai donc fait mon effort sur la fin puis j’ai regardé un peu derrière. J’ai vu qu’Arnaud était 7e-8e et que les Uno-X étaient dans ma roue. Je savais que si je m’écartais, ce pouvait être parfait en vue du sprint car Uno-X devait lancer tôt et Arnaud était bien placé ». Grâce à ce dernier relais de Lewis Askey, le leader picard a donc pu jouer sa carte dans l’ultime faux-plat montant. « Je voulais attendre dans le sprint, car c’était dur, confiait-il. J’étais dans la roue de Girmay. J’étais peut-être un peu loin quand ça a lancé à 200 mètres mais j’avais de la réserve pour gagner. Ça a été difficile de passer, mais sur la ligne, j’ai senti que j’étais devant ». Pour un quart de roue devant Tobias Lund Andresen, au lancer de vélo, Arnaud Démare est ainsi venu conclure cette belle journée de course de la meilleure manière qui soit.

« Je sens que c’est parti », Arnaud Démare

En franchissant la ligne, l’ancien champion de France n’a d’ailleurs pas douté de sa victoire et a immédiatement engagé une célébration en référence à sa jeune fille. « C’est ma deuxième victoire ici et cette édition était plus difficile avec les monts et les pavés, assurait-il. On a fait une belle course et je suis toujours très heureux de lever les bras, d’autant que c’est seulement ma deuxième victoire cette année. Je n’étais pas à mon niveau en début d’année. Je me sens bien désormais, je monte en pression. Je sens que c’est parti. » « Les consignes ont été respectées, on a eu du bon Lewis pour l’accompagner et aussi une très bonne équipe derrière prête à assurer le coup si besoin, concluait Yvon, amplement satisfait. Arnaud revient en bonne forme, d’autant qu’il n’a pas seulement fallu faire un sprint aujourd’hui. Il y a eu de la course, ça a roulé vite pendant 200 kilomètres ». C’est aussi ce pourquoi Lewis Askey, homme clé et 21e sur la ligne ce dimanche, avait le sourire à l’issue de la journée. « Enfin une bonne journée pour moi, confiait-il le soir venu. Depuis les Classiques, j’avais du mal à retrouver mon niveau, il me manquait un petit quelque chose. Je viens de faire 2-3 bonnes semaines à l’entraînement, j’avais hâte d’être ici, et je me sentais vraiment bien dès le départ. Je suis vraiment content d’avoir eu les jambes aujourd’hui. On est super contents car Arnaud a fini le travail, et personnellement, c’est aussi une performance dont j’avais vraiment besoin ».