Le Giro d’Italia Giovani Under 23, aussi traditionnellement surnommé « Baby Giro », est en pause ce mercredi. Après quatre jours de course intense, l’épreuve opère une transition de près de 400 kilomètres vers l’Ouest pour rejoindre le Piémont et les trois dernières étapes. La Conti aborde cette deuxième moitié de course placée, avec Romain Grégoire, Reuben Thompson et Lenny Martinez dans le top-6 du général, à la suite d’une étape reine à travers le Mortirolo où l’équipe bisontine aura clairement marqué l’épreuve de son empreinte.

Des Marches à l’Émilie Romagne, la première étape du Giro d’Italia Giovani Under 23 emmenait les coureurs de Gradara à Argenta pour un scénario des plus limpides. Une petite échappée s’est dégagée, le peloton a contrôlé pour un sprint massif, qu’a finalement réglé l’Italien Alberto Bruttomesso. « On a essayé de placer Samuel, mais il a été peu enfermé et n’a pas réellement pu s’exprimer », initiait Jérôme Gannat. Le Britannique a ainsi pris la quatorzième place à l’occasion de cette journée d’ouverture, à la veille d’une étape plus accidentée vers Pinzolo. « L’étape n’était pas très difficile, mais elle n’était pas simple non plus, et on changeait clairement de profil, assurait Jérôme. Il y avait quelques côtes et 2000 mètres de dénivelé. On savait que les sprinteurs n’allaient pas forcément jouer la gagne. On savait aussi que le maillot rose n’allait pas rouler, que ça allait tergiverser, alors on a pris la course en main. On a roulé, surtout avec Lorenzo, pour maintenir l’écart ». Une échappée de trois hommes a tenté de résister, mais le peloton avait la situation sous contrôle. « On a tellement bien roulé qu’on s’est rapproché de l’échappée à une minute au sommet de la dernière bosse, à trente kilomètres de l’arrivée, relatait encore Jérôme. Leo Hayter a alors attaqué et personne n’a réagi. À cet instant-là, on le classait plutôt parmi les outsiders. Avec du recul, c’était forcément une erreur de le laisser partir, d’autant qu’il n’y a pas eu une super entente en poursuite. Même s’il y avait encore 90 coureurs dans le peloton, peu d’équipes étaient encore au complet pour s’organiser. Il a donc conservé un peu moins d’une minute sur la ligne d’arrivée. Romain a ensuite bien emmené le sprint pour Sam, mais Sam n’a pas trouvé l’ouverture et s’est fait déborder. Sinon, je pense qu’il aurait eu les moyens de régler ce sprint ».

« On est passé d’un état euphorique… » Jérôme Gannat

L’Anglais vainqueur de Gand-Wevelgem Espoirs prenait cette fois-ci la treizième place, alors que se profilait lundi le plat de résistance de ce Baby Giro. « C’était une journée particulière, de 170 kilomètres, avec 5000 mètres de dénivelé et un fictif qui était en réalité la montée de Madonna di Campiglio, présentait Jérôme Gannat. C’était donc un fictif de 50 minutes et déjà un gros morceau pour commencer ». À la suite d’une descente humide, une échappée a pu se former autour de quatre hommes dans le Passo del Tonale, et la Conti a sorti les crocs un peu plus tard. « Ce n’est qu’après la descente d’Aprica, avant le Passo di Guspessa – voisin du Mortirolo – qu’ils se sont mis en tête du peloton pour aborder la montée principale aux premières places, continuait Jérôme. Sam et Lorenzo ont fait tout le pied de l’ascension puis l’objectif était de faire attaquer Lenny car cette bosse de 12 kilomètres à 10% lui convenait parfaitement ». Éblouissant sur la Mercan’Tour Classic quelques jours auparavant, le grimpeur de poche tricolore n’a pas déçu. Il a ainsi attaqué à sept kilomètres du sommet, s’est isolé immédiatement, et a basculé avec plus d’une minute d’avance sur un trio comprenant Romain Grégoire et le maillot rose, Reuben Thompson étant lui pointé à peine plus loin. À cet instant, il lui restait toutefois encore soixante kilomètres à couvrir. « La descente ne représentait pas un problème pour lui, soulignait Jérôme. La vraie interrogation était de savoir comment allaient se dérouler les trente derniers kilomètres pour aller à Santa Caterina Valfurva. Selon l’avance de Lenny, on s’était dit qu’on déciderait de continuer ou pas. On savait que ça allait être long dans la vallée montante vent de face jusqu’à Bormio. À l’issue de la descente, il avait plus de deux minutes, donc on lui a évidemment dit de continuer ». À trente kilomètres du but, la situation paraissait d’autant plus idéale que Lenny menait avec deux minutes sur Romain Grégoire, détaché du groupe de poursuite, et près de trois minutes sur le maillot rose.

Néanmoins, tout s’est renversé en l’espace de quelques minutes. « Lenny a un peu buté avec le vent de face, puis il a commencé à sentir la fatigue, à avoir moins d’énergie, confiait Jérôme. Il n’avait plus rien dans les jambes pour prolonger un effort qui durait déjà depuis un bon moment. On se doutait que la fraicheur physique allait faire la différence dans cette longue vallée. Romain et Reuben avaient pour principal objectif de protéger l’échappée de Lenny. Ils ont essayé, mais Leo Hayter est sorti du lot et il a particulièrement fait la différence dans la portion vent de face ». Le Britannique a d’abord rattrapé Romain Grégoire avant de lâcher tout le monde pour aller cueillir un Lenny Martinez en souffrance. La jonction a été opérée à un peu moins de vingt bornes du but, puis Hayter a poursuivi son action et créé d’énormes différences sur ses concurrents. Au sommet de Santa Caterina Valfurva, le maillot rose s’est finalement imposé avec 4’55 d’avance sur Grégoire, tandis que Reuben Thompson et Lenny Martinez ont fini roue dans roue à près de six minutes, en quatrième et cinquième positions. « En cinq kilomètres, on est passé d’un état euphorique où on avait la mainmise sur la course, à un renversement complet de situation, confessait Jérôme. Même Axel Merckx (directeur sportif de Leo Hayter, ndlr) pensait que c’était plié quand il a vu Lenny avec 2’30 d’avance. Je pense que Lenny et Romain ont pu payer leur jeunesse. C’était une journée très difficile, qu’ils n’ont sans doute jamais connue. Hayter est troisième année Espoirs, eux sortent des Juniors, et c’est peut-être ce petit fond qui leur a manqué dans le final. C’est normal… On est simplement tombés sur un gros Leo Hayter, qui a explosé la course. Le bilan collectif était néanmoins très bon. On a terminé 2e, 4e et 5e de l’étape. Il n’y a pas photo, on a la meilleure équipe. Malgré tout, on était tous un peu déçus car on venait pour chercher le maillot rose, et ça s’est évidemment compliqué au vu des écarts ».

« On va essayer des choses », Jérôme Gannat

Mardi, à l’occasion de la quatrième étape, la Conti est repartie de l’avant en envoyant Samuel Watson dans l’échappée vers Chiavenna. « Avec les écarts au général, on pensait que l’échappée pouvait aller au bout, mais certaines équipes qu’on n’avait pas vues le premier jour avaient envie d’un sprint, indiquait Jérôme. Sam a réussi à prendre la bonne échappée, mais avec le recul, ce n’était pas forcément un très bon choix stratégique. C’est dommage, car dans un sprint en petit comité, Sam aurait pu faire quelque chose de bien. C’était un sprint assez difficile, un peu montant. Ils n’étaient plus que quarante dans le peloton, ça frottait moins, et ça convenait bien à Romain qui est venu chercher une bonne troisième place. Lenny a lui perdu un peu de temps car une chute à cinq kilomètres de l’arrivée a créé beaucoup de cassures ». Après quatre jours de course, la Conti cumule donc deux podiums d’étape, occupe les deuxième (Grégoire), quatrième (Reuben) et sixième (Lenny) places du général, domine largement le classement par équipes et mène également le classement des jeunes. Trois étapes restent désormais à effectuer. Avec quels objectifs ? « Les écarts au général sont maintenant assez conséquents, admet Jérôme. Il y aura une grosse arrivée au sommet vendredi. Reprendre cinq minutes parait compliqué, mais on va essayer des choses. On va faire la course jusqu’au bout. La victoire d’étape nous intéresse également, surtout dans une telle arrivée au sommet sachant qu’on possède les meilleurs grimpeurs du peloton. Jeudi, il y aura un col au début, puis cent kilomètres tout plats. La dernière étape sera un peu plus vallonnée avec une arrivée en haut d’une côte pavée, qui pourrait bien convenir à Sam et Romain. On reste dans une optique pour le général, mais les victoires d’étapes sont envisageables vendredi et samedi ».

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