Enfin. À l’occasion du troisième sprint du Tour de France ce jeudi, Arnaud Démare a enfin pu se mêler à la bagarre pour la victoire d’étape. Tout ne fut pas simple pour autant, puisque ses équipiers ont très tôt dû assumer leurs responsabilités pour neutraliser une échappée très dangereuse, puis l’ancien champion de France a perdu son fidèle poisson-pilote Jacopo Guarnieri à trois kilomètres de l’arrivée. Malgré des circonstances encore imparfaites, le Picard est venu glaner la quatrième place du jour, mais visera évidemment bien plus haut au sortir des Alpes.

« On ne les y reprendra pas », Thierry Bricaud

Entre Tours et Châteauroux, sur à peine 160 kilomètres, la sixième étape du Tour de France aurait pu connaître un scénario lisse, limpide, et une arrivée massive, comme prévu. Certains coureurs et certaines équipes en avaient manifestement décidé autrement. Après moins de cinq kilomètres, ce sont en effet huit coureurs, et pas des moindres, qui ont ouvert une brèche dans le peloton. Kasper Asgreen (Deceuninck-Quick Step), Soren Kragh Andersen (Team DSM), Thomas De Gendt (Lotto-Soudal), Greg Van Avermaet (AG2R-Citroën) ou bien encore Toms Skujins (Trek-Segafredo), Jonas Rickaert (Alpecin-Fenix), Georg Zimmermann (Intermarché-Wanty Gobert) et encore Nils Politt (Bora-hansgrohe) prenaient en effet place dans une échappée quatre étoiles et l’Équipe cycliste Groupama-FDJ se retrouvait elle en position très délicate. « Le départ s’est mal passé pour nous, relatait Thierry Bricaud. On a manqué d’un peu de vigilance et une fois l’échappée sortie, on était pratiquement la seule équipe de sprinteur non représentée. On savait que ça pouvait arriver mais on a manqué de concentration. Les gars ne devaient pas s’attendre à ce type de départ. Il y avait d’excellents coureurs devant et on n’a pas tergiversé bien longtemps. On a tout de suite vu et communiqué. Mais le temps que les gars puissent remonter et se mettre en place, l’écart était monté à 40-50 secondes car ils se sont mis tout de suite à bloc devant. Il a très vite fallu rectifier le tir, au risque de ne pas pouvoir offrir un sprint à Arnaud. On a donc assumé et ça a duré trente kilomètres… Même si on a fait une petite boulette en début de course, il faut aussi reconnaître que les gars ont bien réagi derrière, notamment Bruno, Stefan ou Val. C’est le jeu, mais la prochaine fois, on ne les y reprendra pas ».

Au cours des trente premiers kilomètres, l’allure moyenne a franchi les 53 km/h et l’écart un temps monté à la minute, est finalement passé sous les vingt secondes au passage d’Amboise. Quelques minutes plus tard, et grâce à la collaboration de deux autres formations, la jonction a été effectuée et seul Greg Van Avermaet s’est retrouvé en tête de course. Il a un peu plus tard reçu le soutien de Roger Kluge (Lotto-Soudal) mais la situation était désormais sous contrôle. Arnaud Démare et ses hommes ont alors laissé d’autres formations mener la chasse toute la journée, puis se sont replacés à l’entame de la dernière heure de course dans le sillage de Bruno Armirail ou Valentin Madouas. Un peu plus tard, à l’approche de Châteauroux, c’est Stefan Küng qui a repris la barre pour mettre le train sur les bons rails. « Les forces dépensées en début de course ont pu manquer dans le final, mais l’approche a malgré tout été assez limpide, soutenait Thierry. On savait de toute façon qu’il fallait arriver au dernier moment dans le sprint, mais le fait marquant est qu’on perd Jacopo dans les trois derniers kilomètres. Dès lors, ce n’était plus du tout la même approche ». « Il faut de la réussite aussi dans le vélo, et pour l’instant elle n’est pas en notre faveur, soupirait Arnaud Démare. C’est venu frotter sur notre droite, on s’est accroché avec Jacopo et il est tombé. Il a fallu se réorganiser derrière. Pendant 500 mètres, je me suis demandé : « comment on fait ? ». Miles était encore là, il se retournait, m’encourageait et on s’est remis dans le match. C’était une configuration bizarre mais on s’est bien remobilisés et Miles a fait du bon boulot ».

« J’ai la gagne dans les jambes », Arnaud Démare

Le rouleur australien a tenu jusqu’aux 600 derniers mètres puis l’ancien champion de France a tenté de se frayer un chemin jusqu’à la ligne. Il n’a néanmoins pu combler la dizaine de mètres qui le séparait de Mark Cavendish au lancement du sprint. « C’est dommage qu’on arrive pas à choper le train d’Alpecin, regrettait simplement Arnaud, car sur la vitesse, je n’étais pas trop mal. Il y avait moyen de jouer. Je me sentais rapide et il y avait possibilité de mieux faire ». Sur la ligne, après avoir contourné Peter Sagan et Cees Bol notamment, le Picard a toutefois dû se contenter de la quatrième place. « Le côté frustrant est de voir qu’il y avait moyen de faire beaucoup mieux, confirmait Thierry. Il faut que tout soit bien aligné au bon moment. Il ne faut pas oublier qu’il était par terre il y a trois jours. Il avait besoin de reprendre de l’assurance et c’est ce qui s’est passé aujourd’hui. On sait, et lui sait aussi, qu’il est de retour ». « J’ai la gagne dans les jambes, assurait Arnaud. Je n’ai pas pu jouer le premier sprint, j’étais un peu perturbé sur le second, mais là c’est bon, j’y crois. Il va juste falloir attendre une semaine. Si je suis mis dans les bonnes dispositions sur le prochain, il y a clairement moyen… » Avant de retrouver une potentielle arrivée massive, quelques reliefs vont désormais se présenter sur la route des coureurs. Cela commencera dès vendredi en direction du Creusot. « Ce ne sera en aucune façon une étape de transition, prévient Thierry. Déjà, il y a 250 bornes, ce qui n’est pas rien. Ensuite, la deuxième partie est très difficile et les coureurs seront toujours en prise sur des petites routes. Qu’il y ait échappée ou pas, il peut y avoir du mouvement pour le général. Il faudra rester concentrés ».