En deux jours, Thibaut Pinot a repris près de deux minutes – 1’47’’ exactement – aux trois coureurs qui le précèdent et s’il n’a pas mis un pied sur la troisième marche du podium, il est des favoris du Tour d’Italie celui qui fait la meilleure impression, celui qui ne subit pas les événements. Après une énorme bagarre à plus de cent kilomètres de l’arrivée à laquelle ont pris part tous ses équipiers, une échappée de 18 coureurs qui a pris le large et favorisé les desseins de Landa (Team Sky), Thibaut Pinot a été le seul à attaquer et à savoir tirer parti des circonstances.

Cette étape s’est donc bien écrite en trois temps, le premier d’une façon étonnante, après 50 kilomètres de course. Le maillot rose Tom Dumoulin a commis l’erreur de descendre au bas du peloton tandis que quatre de ses équipiers roulaient. Trois équipes se sont alors entendues pour le sanctionner, Movistar, Bahrain-Merida et FDJ.

« Il y avait une descente qui s’est faite à bloc, explique Martial Gayant, au bas il y avait trois pelotons. A l’avant, se trouvaient 8 Movistar, 5 FDJ, les Bahrain-Mérida, en tout 15 coureurs à rouler. Dumoulin s’est retrouvé à 45 secondes et la partie de manivelles a duré 50 kilomètres. Ce soir, Benoît Vaugrenard qui y a pris part, disait son bonheur d’avoir été au cœur d’une telle action :  

‘’Ça faisait mal à la gueule, a dit Ben à Martial, mais qu’est-ce que ça fait du bien ! C’était une vraie course de vélo !’’

A l’arrière, Dumoulin a eu la chance de trouver avec qui rouler, les équipes de ses compatriotes Mollema (Trek-Segafredo) et Kruijswijk (LottoNL-Jumbo) en plus de celle de Yates (Orica-Scott). Le peloton réduit à 40 coureurs s’est regroupé à 85 kilomètres du but, le contingent FDJ était le plus imposant !

« Tout le monde [équipe FDJ] est tiré vers le haut, les équipiers répondent présents, Thibaut est concerné et confirme qu’il est un leader de Grand Tour » M.Gayant

Le peloton s’est relevé et en deux vagues, dix-huit coureurs ont pris les devants, dont Rudy Molard. Une fois l’avance portée à plus de onze minutes, Rudy a anticipé l’ascension de Piancavallo avec Luis Leon Sanchez (Astana) mais il n’a pu suivre l’Espagnol qui, lui-même, a ensuite payé ses efforts.

Dans cette longue ascension de 15 kilomètres, le maillot rose a été distancé rapidement mais ni Quintana, ni Nibali n’a eu les jambes pour attaquer, pour repousser le Hollandais très loin. Finalement, Thibaut a été le seul à prendre l’initiative. Il est sorti seul du groupe des costauds. Il n’a plus été revu.

«  Thibaut a retrouvé ses sensations de la première semaine, assure Martial, il finit bien le Giro. Le début de semaine a été difficile mais chaque jour qui passe lui permet de se retrouver. Il a attaqué à un endroit difficile avec de forts pourcentages et quand Dumoulin se maintenait à 200 mètres. Le sommet était plus roulant et à un moment donné il faut prendre ses responsabilités. Pour creuser des écarts et reprendre du temps, il faut passer à l’attaque. Ni Quintana ni Nibali n’en étaient capables. Zakarin et Pozzovivo l’ont fait plus tard sans revenir sur Thibaut. Je pense que Nibali et Quintana étaient bien contents de tomber sur des équipiers distancés de l’échappée pour limiter les dégâts.

Vous verriez les gars ce soir… Tout le monde est tiré vers le haut, les équipiers répondent présents, Thibaut est concerné et confirme qu’il est un leader de Grand Tour. Il a repris 1’21’’ à Dumoulin, 15 secondes à Nibali et Quintana en passant à l’attaque. A la limite, peu importe le gain, Thibaut a marqué les esprits. Cette poignée de secondes fait un bien fou au moral comme le fait d’être sous la minute par rapport au maillot rose !  »

« Il fait vibrer les gens devant la télé mais il fait vibrer aussi son staff et ses équipiers » M.Gayant

Certes il y a dimanche un contre la montre de 20 kilomètres pour finir mais il reste une étape difficile, demain en direction d’Asiago et le directeur sportif de l’équipe FDJ pense qu’une manœuvre est possible.

« Il y a le col de Montegrappa, précise-t-il, et une dernière montée à 15 kilomètres de l’arrivée Il va faire chaud avec des côtes bien raides qui font mal. On voit l’état du peloton, tout le monde est fatigué. Montegrappa est à 90 kilomètres de l’arrivée, il y a des choses à faire. C’est 24 kilomètres d’ascension puis une belle descente. Le dernier col est dur, 14 kilomètres avec des pentes à 11%. Thibaut, chaque jour il s’approche de ceux qui le précèdent. Il fait vibrer les gens devant la télé mais il fait vibrer aussi son staff et ses équipiers. Vivement demain ! »

Par Gilles Le Roc’h 

  

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