Le dernier épisode s’était conclu par le fructueux week-end en Franche-Comté. Après ça, j’ai profité de ma présence dans ce coin de la France pour passer du temps à Montbéliard, le lieu de mes études. Je me suis ressourcé, j’ai mangé du bon fromage, puis j’ai repris en vue des courses en Bretagne, où le but était de me faire plaisir avec un collectif solide. Pour l’anecdote, j’ai atterri à Rennes en pensant être arrivé, mais pas du tout. Il restait trois heures de route pour rejoindre l’hôtel. C’était la petite surprise du chef. Sur la première course, les Boucles de l’Aulne, j’ai pu m’échapper, Valentin a également tenté des choses, puis on a essayé d’emmener Lewis au mieux pour le sprint. Il a super bien joué le coup et signé sa première victoire professionnelle. À cet instant-là de la saison, je n’avais manqué que la victoire de Romain sur l’Ardèche Classic. Tom [Donnenwirth] avait lui été témoin des cinq victoires ! On en rigolait en disant qu’il fallait qu’il soit là pour qu’on score. Gagner, c’est toujours un moment de joie. On ne s’y habitue qu’à moitié. En Franche-Comté, on avait d’ailleurs pu voir que j’étais toujours un peu « hystérique » quand Guillaume gagnait, car ça reste un sentiment incroyable. Il faut profiter de ces moments, car comme je le disais une fois en debriefing, on ne gagnera pas tous les week-ends.

Sur le Tour du Finistère, mon but était d’emmener Thibaud jusqu’au virage à 400 mètres de la ligne. Je me souviens avoir trouvé l’ouverture pour remonter, mais Lewis a attaqué à ce moment-là, et j’ai logiquement un peu coupé mon effort. Quand ça a réaccéléré, je n’étais plus dans le rythme, et j’ai un peu serré Thibaud. Au final, Lewis s’est fait contrer par Aubin Sparfel, mais ça aurait tout aussi bien pu marcher. Sur le Grand Prix du Morbihan ça ne s’est pas super bien passé pour l’équipe. J’ai de nouveau essayé de placer Thibaud au mieux dans le final, Tom était bien positionné également, mais ça ne l’a pas fait, ce qui peut parfois arriver. On est repartis tard de l’arrivée avec Axel Beaugendre, un assistant de l’équipe, et il y avait encore un temps de trajet incroyable pour retourner à l’hôtel. On est arrivés à 21 heures et tous mes collègues avaient fini de manger. J’ai quand même eu le temps de faire un debriefing avec les directeurs sportifs pour parler de ce qu’on pouvait améliorer. C’est toujours un moment dont je suis friand. Après la Bretagne, mon entraîneur David Han m’a annoncé qu’on allait faire une semaine d’endurance fondamentale pour assimiler la première partie de saison. Je ne connaissais pas trop ce procédé, mais je me suis dit : « trop bien ! » Je ne vais pas dire que c’est les vacances, mais tu roules sans pression mentale, sans exercice, et tu as du temps dans la journée pour faire d’autres choses. 

Ça m’a permis de bien récupérer, même si cette semaine a été jalonnée de petits pépins. L’un d’entre eux a eu lieu au sommet du col de la Madone, alors que j’étais avec mon ami Yaël Joalland. J’ai voulu remettre mon chasuble sans manche, j’ai lâché mon guidon, et au moment de reprendre appui, j’ai tapé un caillou sur la roue et mes mains ne se sont pas posées au bon endroit. Je n’ai pas pu freiner et j’ai tiré sur la gauche dans les rochers. Je ne suis pas tombé, mais je me suis bien râpé l’avant-bras. Ça rappelle que le cyclisme est un sport dangereux, et que des choses toutes bêtes peuvent parfois coûter cher. Sur une note plus amusante, au départ d’une sortie à Nice, je me suis retrouvé à côté d’un scooter au feu rouge. Le pilote avait la visière du casque levée, j’ai réfléchi quelques secondes, et j’ai dit : Gérard Holtz ? « Oui ». Le feu est passé au vert, j’ai continué ma route, mais j’espérais qu’il me rattrape. J’avais envie de discuter deux secondes et de prendre un selfie. C’est quand même quelqu’un qui a marqué mon enfance avec le Tour de France ou Stade 2. On s’est retrouvé au feu rouge suivant, on a fait un selfie et il a été super sympa. C’est un vrai passionné. Il m’a même demandé où j’allais rouler ce jour-là. C’était hyper agréable de discuter avec lui, même pour un court instant.

J’ai continué à m’entraîner durant cette semaine, puis je suis parti à Corrençon-en-Vercors le 22 mai. J’étais convié pour un stage organisé par FDJ, avec une vingtaine de leurs collaborateurs et employés. J’étais là pour les accompagner durant leur sortie avec Baptiste Grégoire. On est allés rouler avec eux le vendredi après-midi, et c’était un chouette moment. Je suis beaucoup dans l’humain de manière générale, et je me nourris d’être au contact de nouvelles personnes. Ils étaient heureux qu’on soit là, qu’on les suive, qu’on les pousse. C’était un échange très intéressant, car ils ont eux aussi des choses à raconter par rapport à leur métier. Mentalement, ça fait beaucoup de bien de discuter avec d’autres gens l’espace de deux petits jours et de sentir leur passion. Yvon Caër m’avait prévenu en amont que je serais leader sur la Mercan’Tour Classic. J’étais content. C’était aussi une sorte de récompense pour ce que j’avais fait en début de saison. C’était une petite pression, mais je ne me sentais pas non plus illégitime. Je me disais que dans une bonne journée, je pouvais être parmi les meilleurs du groupe convoqué sur cette course. Je me suis mentalisé dans ce rôle, et ça m’a fait du bien de retrouver ce statut après l’avoir beaucoup connu au CIC U Nantes Atlantiques l’an passé.

J’étais seulement un poil stressé car je n’avais jamais vraiment prouvé quoi que ce soit sur des cols longs en compétition, malgré ce que mon gabarit peut laisser présupposer. La course s’est emballée dans le col de la Couillole, et la dernière montée de Valberg s’est faite au courage. Tom avait fait un super boulot ce jour-là. Au sommet de la Couillole, je lui avais même dit d’en garder, car j’avais l’impression qu’il était le plus fort. On en a discuté a posteriori. Il s’était lancé dans ce rôle d’équipier, et il n’était pas prêt mentalement à tout donner jusqu’à la ligne. Au vu de son travail, j’étais obligé de m’arracher et d’aller chercher un résultat. D’un côté, la huitième place est satisfaisante car je n’avais pas de références sur ce type de profil. J’aurais aussi pu péter au bout de dix kilomètres ! En revanche, le niveau n’était pas extrêmement relevé, donc faire huitième n’est pas non plus incroyable. Je suis peut-être dur avec moi-même. En tout cas, si j’ai fait huitième ce jour-là, c’est que je ne pouvais pas faire mieux.

Le vrai objectif était d’arriver en très bonne forme sur le Critérium du Dauphiné, qui est une course importante pour l’équipe. C’était un peu un rêve pour moi d’être là, qui plus est pour ma première année en WorldTour. Comme depuis le début de saison, j’avais à cœur de donner le maximum pour aider l’équipe. On attendait notamment de moi que j’épaule Guillaume sur les étapes un peu dures et je voulais leur montrer qu’ils pouvaient compter sur moi. Avec David [Han], on avait décidé de peaufiner la préparation en faisant quelques grosses séances, avec notamment une sortie de six heures avec plus de 4000 mètres de dénivelé pour préparer les grosses étapes de montagne. J’ai également fait du sauna pour préparer la chaleur. Ce n’était pas une partie de plaisir mais il fallait passer par là. J’ai divisé ma séance de trente minutes en deux, et lorsque j’ai commencé la deuxième session, je n’espérais qu’une chose : que quelqu’un rentre, car je commençais à trouver le temps long. Finalement, un homme est entré, on a discuté, et la séance est passée beaucoup plus vite. Le début de Dauphiné a proposé quelques étapes pour sprinteurs, où j’ai essayé, malgré mon gabarit, d’aider l’équipe. Je n’ai pas le meilleur profil pour ce travail, mais avec ma volonté, j’essayais d’être là pour placer Clément et Paul du mieux possible.

On a attaqué la montagne le vendredi et j’ai vraiment vécu une étape très difficile ce jour-là. J’ai essayé de prendre l’échappée au départ, j’ai été acteur pendant un moment, mais c’est sorti sans moi et j’ai été bloqué par le barrage du peloton. J’étais fou. Je fulminais intérieurement. J’avais envie de forcer le passage, mais je ne pouvais pas mettre en danger tout le monde. Il faut s’y faire, ça fait partie des us et coutumes du peloton, mais ça reste frustrant. Honnêtement, j’étais dégoûté. Ensuite, ça a roulé super vite, on n’était pas bien placés au pied du Mont-Saxonnex, et on a totalement subi la course. Je m’en voulais à titre personnel car je pense être quelqu’un qui est d’habitude capable d’impulser ce genre de choses. Ce jour-là, on a subi la loi de Visma-Lease a Bike qui a roulé plein fer à l’approche de la bosse. C’était en file et c’était impossible de remonter. On s’en voulait, mais Guillaume avait heureusement limité la casse. Il avait été très costaud, car il y avait des cassures de malade dès le pied. Il fallait être très solide mentalement et physiquement pour réintégrer le premier groupe. Ce jour-là, on a pris un bon rappel à l’ordre. Avec le recul, cette journée m’a peut-être permis de faire le week-end que j’ai fait. J’avais envie de me racheter et je voulais encore plus être dans l’échappée le lendemain.

Le samedi, je n’avais que ça en tête. On m’avait demandé d’essayer d’être avec Guillaume dans la vallée avant le dernier col, et le seul moyen pour que j’y parvienne compte tenu du niveau sur cette course, c’était d’être dans l’échappée. Je me souviens d’un départ costaud. J’ai essayé une première fois, et je me suis retrouvé avec Matteo Jorgenson à l’avant. J’étais vert de rage. J’avais envie de lui dire « relèves-toi, tu sais très bien qu’ils ne vont pas te laisser sortir ! » On s’est fait reprendre, et j’ai réessayé plusieurs fois. Je savais que Jordan Jegat voulait être devant ce jour-là car on s’était parlé avant l’étape. À un moment donné, c’est ressorti, et il m’a dit : « on y va ! » Je lui ai répondu que j’avais besoin de récupérer, mais il a lancé, et je l’ai suivi sans me poser plus de questions. J’étais dans le dur total, on a réussi à rentrer devant, mais ce n’est qu’au sommet du col de la Madeleine qu’on a commencé à prendre un peu d’avance. Pour donner un ordre d’idée, j’ai fait mon record de puissance sur une heure dans La Madeleine. C’était une montée très solide, et j’étais vraiment très satisfait de pouvoir être là. Je me suis surpassé pour être devant, mais si Jordan n’avait pas été là pour me dire d’y aller, j’aurais peut-être soufflé un coup et raté le coche.

Dans le Col de la Croix de Fer, Guillaume est sorti du peloton pour anticiper l’attaque des favoris. Il est rentré sur nous à 5-6 kilomètres du sommet, j’ai pris un relais pour qu’on essaie de creuser un peu, mais le peloton a roulé « Mach 12 » derrière. Ils nous ont repris 1’30 en dix minutes. Je n’ai pas réussi à suivre le petit groupe de Guillaume qui s’est esseulé au sommet, je me suis retrouvé en chasse-patates et mon but était de me faire reprendre par le groupe maillot jaune le plus tard possible pour basculer avec eux. J’ai été repris à 500 mètres du sommet, et là je me suis dit : mission accomplie. Pour l’anecdote, on a vu à la télé qu’Ivan Romeo s’était énervé contre moi dans la descente. En fait, je me suis relevé pour aller chercher des bidons, il était dans ma roue et n’a pas vu la cassure. Je pense que tout le monde était un peu à fond à ce moment-là, et il s’est un peu énervé. Il m’a mis une petite tape dans le dos, à laquelle je n’ai pas réagi. J’ai certes fait une petite cassure sans prévenir, mais je pense qu’il a réagi un peu violemment pour ce que c’était. J’ai ensuite accompagné Guillaume jusqu’au pied de la montée finale. J’ai essayé de suivre le tempo d’UAE en me disant « on ne sait jamais », mais j’ai laissé tomber au bout de dix minutes car j’étais déjà bien entamé.

J’ai décidé de prendre mon tempo. Dans un premier temps, j’ai pris un bon rythme car j’avais fait une belle journée, et ça valait le coup de bien la terminer. Puis, je suis rentré sur Romain Bardet, qui avait fait un numéro ce jour-là. Il restait dix kilomètres et je me suis dit que j’allais rouler avec lui plutôt que de faire le mec qui roule tout seul à fond jusqu’à la ligne. En plus, je n’avais aucun réel intérêt à faire ça, d’autant qu’il restait une grosse étape le lendemain. J’ai donc passé la fin de la montée avec lui, et c’était un super moment. Romain, c’est quand même un mec qui a « drivé » ma jeunesse. Il fait partie de ces coureurs français qui ont marqué ma génération. Pouvoir partager ces kilomètres avec lui, voir tout le monde crier son nom, le remercier, le féliciter pour sa carrière, c’était incroyable. Dans cette montée, il y a eu peut-être deux milles « Allez Romain » et un ou deux « Allez Clément ». J’en rigole, mais il l’a évidemment mérité. Je me souviens passer la ligne avec lui, voir son sourire, entendre tout le monde l’encourager. C’était un super moment de sport. Chapeau en tout cas à ce monsieur pour sa carrière. C’était un plaisir de partager cette fin de course avec lui.

Je me suis régalé de bout en bout lors de cette journée. Mon but était de prendre l’échappée et d’aider Guillaume dans la vallée, ce que j’ai réussi à faire. Après la Croix de Fer, je lui ai dit que j’étais un peu râpé mais que j’étais là s’il avait besoin de quoi que ce soit. Il m’a répondu : « Rends-toi compte qu’on n’est plus qu’une vingtaine. C’est énorme qu’on soit deux dans le groupe et que tu aies réussi à basculer ». J’ai réalisé à ce moment-là que j’étais en train de faire un truc sympa. Le soir de l’étape, pendant le massage, j’ai reçu ce SMS : « Félicitations Clément, tu deviens un bon coureur ». Le numéro n’était pas enregistré dans mon répertoire, mais je me doutais que c’était quelqu’un que je connaissais. J’ai répondu : « Bonsoir, qui est-ce ? Je n’ai pas enregistré votre numéro désolé ». J’ai reçu un smiley qui rigole accompagné du message « Faute professionnelle ». Je ne me suis pas trop pris la tête et j’ai moi aussi répondu avec un smiley qui rigole. Dix secondes après, j’ai reçu : « Alors ? » J’ai compris que j’avais raté un épisode. Je suis allé voir le profil du numéro sur WhatsApp. C’était Marc Madiot. J’ai éclaté de rire sur la table de massage, tout en me disant : « t’es vraiment c** Clément, le boss de l’équipe !! ». S’il y a un numéro à enregistrer chez Groupama-FDJ, c’est bien Marc Madiot. Au bout du compte, je l’ai remercié, il m’a appelé, et on a discuté cinq minutes. C’est aussi quand on reçoit des messages comme celui-ci qu’on se rend compte que l’équipe est plutôt contente de ce qu’on a fait.

Sur la dernière étape, le but était encore de prendre l’échappée. On a réagi un peu à contre-temps pour essayer d’y placer Guillaume et on n’y est pas parvenu. Mais je me souviendrai de cette journée très, très longtemps. Ça s’est posé complètement pendant cinq minutes, à 25-30 km/h, puis Uno-X a pris la barre et ça s’est mis à rouler subitement à bloc, avec le vent ¾ dos. Il y avait des mini cassures, on roulait sur le bord de la chaussée, et je me suis dit que ça allait être comme ça jusqu’au bout… J’ai vécu une de mes journées les plus intenses sur le vélo. Ça ne faisait que péter par l’arrière, ça ne se posait jamais, et je me souviens que j’attendais les bosses pour me « reposer » car ça roulait à une vitesse incroyable sur le plat. Tout le monde était à fond. J’ai pensé craquer plusieurs fois, mais je me suis accroché jusqu’à la dernière bosse pour essayer d’accompagner Guillaume. Qu’est-ce que c’était dur, franchement. J’avais vécu une journée semblable sur le Tour du Pays Basque, où j’avais eu du mal à remonter les bidons tellement ça roulait fort. C’était pareil. D’ailleurs, je me souviens m’être décalé prendre un bidon dans la dernière bosse, j’ai perdu trois mètres, je ne pouvais plus me mettre en danseuse, donc j’ai lissé mon effort, mais je n’ai jamais réussi à rentrer. C’est là qu’on se rappelle ce qu’est le tempo WorldTour.

Ma vingt-troisième place au général est anecdotique mais elle démontre que j’ai été régulier et jamais très loin. L’essentiel est d’avoir répondu présent sur les étapes de montagne pour aider Guillaume et d’avoir aussi donné le maximum sur les étapes de sprint. Je tire vraiment un bon bilan de cette semaine. Ce n’était pas ma première course WorldTour, mais c’était quand même un tout autre niveau avec la présence des fantastiques. Ils ne laissent pas grand-chose aux autres, mais on essaie de trouver notre bonheur autre part. On sait en se rendant sur le Dauphiné qu’on ne va pas le gagner, mais on a nos propres objectifs et on se rattache à ça. On peut être satisfait du top 10 final de Guillaume, des places de Paul dans les sprints, de celle de Rémi sur le chrono, de l’échappée de Brieuc. Tout le monde a participé à sa manière et je pense qu’on a fait un beau Dauphiné. Pour ma part, j’évolue à mon rythme. Je suis déjà satisfait de ce que je réalise pour une première saison à ce niveau. On franchit chacun des paliers, tôt ou tard. On verra ce que l’avenir nous réserve, mais j’essaie de faire mon métier du mieux que je le peux.  

À la sortie du Dauphiné, j’ai eu l’occasion de passer du temps avec ma copine et les amis. C’est différent de l’an passé dans la mesure où je ne cours pas tous les week-ends. Ça me permet de me ressourcer, de faire des petites soirées et c’est assez plaisant. Le Dauphiné représente aussi une énorme charge de travail sur huit jours, et le but était surtout de récupérer et d’assimiler. Comme me le dit souvent David, c’est dans les phases de récupération que je vais passer des paliers cette année. J’ai ensuite remis en route gentiment en vue du championnat de France. Je sais que c’est un événement très important pour l’équipe, et qu’il s’accompagne d’une sacrée pression pour les leaders. Le championnat est parfois une loterie. Il faut que tout soit réuni le jour J : le physique, la tactique et le brin de chance. J’espère qu’on aura un collectif solide pour peser sur la course et permettre à l’équipe de ramener ce maillot. C’est un projet excitant, car si gagner est toujours incroyable, aider un coéquipier à ramener le bleu-blanc-rouge, c’est autre chose ! J’avais fait un beau championnat l’an passé, mais sous le maillot de CIC U Nantes Atlantique, on ne me demandait pas grand-chose. Aujourd’hui, j’ai un nouveau maillot et c’est une tout autre course, et une tout autre tactique.

Je souhaitais conclure ce troisième volet avec une pensée plus personnelle. J’ai eu le plaisir que mes parents fassent le déplacement pour les premières étapes du Dauphiné. Pour eux, c’est incroyable d’assister à ce que je suis en train de vivre. Je l’ai vu dans leurs yeux, dans leurs sourires. Quand ils voient Van der Poel ou Pogacar passer à côté d’eux, ils se rendent compte que j’ai franchi un cap et que c’est une nouvelle dimension. Ce ne sont plus les courses Élites sur lesquelles ils venaient me voir il y a encore deux ans. Je pense qu’ils sont heureux et fiers de ce qui m’arrive. De la même manière, c’est amusant quand des anciens collègues m’écrivent pour me dire : « c’est super ce que tu fais aujourd’hui, c’est beau que tu en sois arrivé là ». Ça me donne beaucoup de force, je me nourris énormément de ça. J’ai l’impression de faire vivre des choses à des gens, et c’est aussi pourquoi j’aime cet exercice du Carnet de Route. C’est vraiment génial de voir les copains vibrer quand ils te voient à la télé ou entendent les commentateurs parler de toi. Je suis un peu dans ma bulle, je garde les pieds sur terre, mais je me rends compte qu’ils vivent aussi un truc à travers moi.

C’est toujours un vrai plaisir de recevoir un appel, chaque lundi, d’un de mes premiers entraîneurs. C’est toujours un vrai plaisir de recevoir un message d’un de mes professeurs en école d’ingénieur, qui me suit depuis le début, qui a toujours cru en moi, et qui m’avait dit : « vous serez un bon coureur ». C’est hyper plaisant de donner des émotions aux gens, et surtout de pouvoir rendre la pareille à ceux qui ont cru en nous, et leur montrer qu’on est aussi arrivé là grâce à eux. Ce professeur a investi de son temps et de son énergie pour que je bénéficie d’aménagements à l’époque. De la même manière, mon entraîneur chez les jeunes m’emmenait sur les courses lorsque j’étais cadet, que j’avais des crampes au bout de cinquante kilomètres et que je terminais quarantième. Il avait soixante ans et il continuait de faire ça par pure passion. Je veux donc profiter de cette plateforme pour adresser un remerciement global à toutes ces personnes que j’ai croisées dans mon cursus scolaire et dans ma carrière. Ils ont tous eu une influence, plus ou moins importante, sur le coureur et l’homme que je suis devenu.