« Je me sens bien dans l’équipe fdj.fr ». Au lendemain de sa belle douzième place dans Paris-Roubaix, Arnaud Démare et l’équipe fdj.fr annoncent la prolongation de deux ans du contrat du jeune leader du Trèfle.

Arnaud, tu prolonges ton contrat de 2 ans et jusqu’à la fin 2016. C’est un choix de carrière ?
Je me sens bien dans mon équipe et je n’ai pas attendu que d’autres formations me fassent des propositions pour que je prenne ma décision. Ici, j’ai une équipe dévouée pour moi et quand on a cette chance là, il faut tout faire pour la garder.

Avec ton talent, on peut imaginer que ce serait pareil ailleurs ?
Non, pas forcément. Philippe Gilbert, champion du monde, n’avait pas forcément son équipe pour lui… Vraiment, je suis très heureux au sein de l’équipe fdj.fr, très fier de la confiance qui m’est témoignée. Très heureux de poursuivre sous ce beau maillot bleu.

Tout le monde est unanime dans l’équipe, tu as beaucoup, énormément progressé. Tu as pris de l’expérience, tu a gagné en puissance. Tu quantifies ces progrès ?
Je m’en rends compte, même si ce n’est pas ma discipline, mais dans le contre la montre c’est flagrant. J’ai fait de bons chronos de 10–15 kilomètres, au Tour du Qatar, au Tour d’Algarve, à Tirreno-Adriatico. J’ai la force, tout simplement. Et désormais, j’arrive à produire des efforts beaucoup plus longtemps. La première année, quand j’ai fait le Giro, dans les sprints c’était impossible de doubler le coureur qui était devant moi. Maintenant, je ne me pose même pas la question, ça se passe beaucoup mieux. Je prends du coup beaucoup de plaisir pendant la course. Au début, on m’a reproché de ne pas frotter, mais je ne pouvais pas, j’étais à bloc. Maintenant, étant plus lucide, je vois où je mets la roue, je me replace plus facilement. Je frotte mieux. Au Het Nieuwsblad, en faisant la course devant, je me suis fait énormément plaisir. A Gand-Wevelgem, sur les deux passages du Kemmel, tout s’est bien passé. Oui c’est évident, j’ai progressé.

Tu es encore un peu juste pour passer le cap de 200 et 220 kilomètres dans les classiques ?
Quand j’ai gagné la Vatenfall Cyclassic en 2012 à Hambourg, il y avait 250 kilomètres. En fait, il faut que la course se décante le plus tard possible pour moi actuellement. Au Tour des Flandres cette année, dès le premier passage du Quarémont, ça faisait mal. On venait de faire 100 kilomètres et 100 kilomètres après, je n’étais plus là. J’ai une autonomie de 100 kilomètres de bataille. Quand la course fait 250 km, c’est un peu plus dur à l’heure actuelle. Dans Paris-Roubaix, c’est différent parce que c’est plat.

Pour continuer dans cette progression, sens-tu qu’il est nécessaire aujourd’hui de faire un Grand Tour, de le finir ?
C’est ce qu’on me dit, moi je ne peux pas savoir. On me dit « quand tu auras fini un Grand Tour, tu auras beaucoup plus de force’’. Donc, oui un jour je vais en terminer un. Mais déjà en un hiver supplémentaire et sans faire le Tour, je sens que j’ai pris de la force.

Tu te sens coureur de classiques aujourd’hui ou sprinteur ? C’est un dilemme, ce n’est quand même pas pareil ?
Ce n’est pas pareil mais c’est tout ce que j’aime. Quand j’étais cadet, on disait ‘’Démare, c’est un sprinteur’’, ‘’Démare, c’est un sprinteur’’ et un jour ça m’a énervé et dans une course en Normandie, j’ai attaqué dans le deuxième tour et j’ai fini avec 4 minutes d’avance. J’ai toujours eu ça en tête quand j’étais jeune. Chez les juniors, j’ai terminé le Grand Prix de Lillers avec 1’20’’ d’avance… ça me fait penser à mon ancien entraîneur Hervé Boussard qui est mort il y a un an. J’arrivais à attaquer et à arriver seul quand j’étais le meilleur de ma catégorie. Maintenant, je ne suis pas encore le meilleur de ma catégorie. J’aime le sprint, ça me permet de gagner des courses. J’aime les classiques. J’aime les deux. Pendant la période des classiques, on lâche les chevaux en course. Dans le sprint, il faut rester sage et garder de l’énergie pour le final. Il y a des coureurs qui sont grimpeur-rouleur, moi je suis sprinteur-rouleur.

Marc Madiot dit que tu es devenu un leader, en prenant l’exemple de Gand-Wevelgem. Dans le bus avant le départ, dit-il, tu canalisais toute l’attention autour de toi sans dire un mot ?
C’est les échos que j’en ai mais ce n’est pas évident pour moi de le sentir parce que c’est naturel. J’ai la chance d’avoir vécu ça très tôt. Chez les juniors, on faisait les courses sur moi, notamment dans Paris-Roubaix que j’avais fini à la deuxième place derrière Guillaume Van Keirsbulck. Au championnat du monde aussi. Pareil chez les Espoirs. Toute cette pression des copains, je fais avec. Il y a des coureurs qui n’ont pas l‘habitude qu’on se sacrifie pour eux, ça leur fait perdre leurs moyens et loupent leur course. Moi, je sais que je dois conclure leur travail.

Tu es un leader qui donne de la voix ?
Je ne suis pas un gueulard, je ne crie pas beaucoup. Ce n’est pas nécessaire. Je suis plutôt là pour défendre mes équipiers quand un briefing ne va pas.

Tu dis aimer le sprint mais le sprint ne te le rend pas très bien depuis quelques semaines… Tu le vis comment ?
Le sprint est aléatoire. Dans le sprint de La Panne (2e derrière Modolo) je dois couper mon effort deux fois. Si je refais ce sprint dix fois, je le gagne à neuf reprises. Au Tour d’Algarve, pareil, je n’ai pas l’ouverture et si on le refait dix fois, neuf fois je bats Cavendish. Sans être prétentieux. La belle victoire au Qatar, en voyant tout le monde derrière, ça fait avaler quelques déceptions.

Ça te rend dingue quand tu ne gagnes pas ?
Non. Si je faisais quinzième tous les dimanches je me poserais beaucoup de questions mais là 2, 2, 2, 2 et 2, ça se joue à pas grand chose. Les circonstances de course décident. Et la roue finit toujours pas tourner.

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